La femme, le pire ennemi d’elle-même !
Le 13 août dernier, la Tunisie
fêtait la journée nationale de la femme. Date importante pour le pays puisqu’en
1956, feu Habib Bourguiba avait promulgué le Code du Statut Personnel. Ce code
transforme profondément la société tunisienne de l’époque en intégrant des
lois égalitaires dans le droit de la famille (la suppression de la polygamie,
de la répudiation, reconnaissance de l’adoption…).
Depuis, plusieurs avancées ont
été réalisées y compris sous le régime de Ben Ali. Et plus récemment en 2014 avec
l’égalité entre les hommes et les femmes devant la Loi sans aucune discrimination, ou en 2017 où les femmes ont obtenu le droit de se marier avec des
non-musulmans et en 2018, la première fois qu’une femme célibataire obtient le
droit d’adoption.
Bref, en 2020 les femmes
tunisiennes attendaient une nouvelle avancée, celle de l’égalité des droits
face à l’héritage, aujourd’hui régit par des textes coraniques qui privilégient
l’homme dans le partage.
Lors du discours du président Kais
Saied, très attendu, face à des dizaines de femmes assemblées pour l’occasion,
un détail plus important que l’égalité dans l’héritage intéresse les
journalistes présents : la tenue de la première dame ainsi que son
attitude qualifiée de « classe ».
Jusque-là, pas de soucis, chacun
a le droit de regarder un événement selon le prisme qui lui correspond.
Mais ce qui m’interpelle ceux
sont les commentaires qui ont suivis les articles publiés. Tous ou presque admirent
la belle robe bleue portée par cette dame, son attitude digne, son port de tête
et même son maquillage discret qui fait honneur à la « classe naturelle »
de la femme tunisienne. Ces commentaires ont été, pour la plupart, écrits par…
des femmes.
Des centaines et des milliers de
commentaires qui ont eu pour effet de noyer l’essentiel : l’avancée de l’égalité
des droits entre l’homme et la femme en Tunisie
Autre phénomène qui a eu une
portée mondiale et qui a pris naissance en 2007 mais repris 10 ans plus tard,
en 2017 par Alyssa Milano, est le mouvement « Me too ». Ce dernier
dénonce les harcèlements et agressions sexuelles subies par les femmes, notamment
dans le milieu hollywoodien et qui a fini par toucher toutes les couches de la
société.
Ce mouvement était clair :
raconter son expérience pour ne plus que d’autres femmes puissent subir les
mêmes offenses, ni les accepter, en enterrant leurs cicatrices. Elles n’étaient
plus seules désormais.
La planète, globalement se
mobilise, à plus ou moins grande portée selon les cultures et traditions. Mais
les faits sont là : toutes, partout, ont subits et subissent encore.
Et là, en France, un collectif d’une
centaine de femmes publiques signe une tribune s’intitulant « le droit d’être
importunée ».
Etait-il utile, à ce moment-là de
rappeler la différence entre « séduire » et « agresser » ?
entre « faire la cours » et « harceler » ? Etait-il
vital pour ce collectif d’écrire cette tribune en plein mouvement de
dénonciation? Qu’avaient-elles peur de perdre ? Même si tous et toutes n’étaient
pas d’accord sur l’ampleur et la tournure que ce mouvement prenait, était-il nécessaire
de dire à ces femmes que c’est tant pis pour elles si elles ont été violées ? Car oui, en écrivant cette tribune, à ce moment
précis, c’est bien le message qu’elles ont transmis.
Aux Etats-Unis, en 2016, Donald Trump est face à Hilary Clinton aux présidentielles. Cette dernière perd les élections à quelques milliers de votes près. Ceux des femmes qui lui ont manqué. Elles ont préféré laisser la gestion de leur pays à un misogyne notoire plutôt que de soutenir, la première femme arrivée à ce stade des élections présidentielles, dans la première puissance mondiale.
53% des femmes blanches ont
voté pour Trump sous prétexte qu’on ne pouvait pas faire confiance à Hilary, une femme hypocrite (en référence
à l’affaire Lewinsky) qui pouvait avoir une politique étrangère dangereuse et mener le pays dans des affrontements inutiles. On connaît la suite de l’histoire.
En Afrique subsaharienne, on
pratique l’excision. Cette mutilation génitale est une pratique ancestrale qui
fait partie de certaines traditions et parfois soutenues par des croyances
religieuses.
Des millions de femmes sont
encore concernées, souvent au péril de leur vie. Des efforts importants sont
aujourd’hui déployés dans les pays en question pour lutter contre cette
pratique, alliant prévention et répression. Et ça fonctionne. Le nombre de femmes
de plus de 45 ans ayant subi une excision est deux fois plus important que
celui des moins de 19 ans. Mais c’est encore beaucoup. Alors pourquoi, cette pratique
persiste-elle alors que les politiques prennent position contre ?
Un des éléments de réponses est la ténacité des mères, garantes de l’ordre établi et des traditions. Ceux sont les mères qui emmènent leurs filles, mineures, se faire mutiler parfois contre l’avis du père.
Non, toutes les mères ne sont pas
coincées dans des traditions séculaires imposées par une société patriarcale et
entretenue par elles. Toutes les femmes ne sont pas intéressées que par les
futilités de la vie, qui en font sa légèreté, mais ont conscience de leur
existence et de leurs capacités. Toutes les femmes ne s’inquiètent pas plus de
leur tenue que du discours qui sera prononcé.
Le tout est de se rappeler, qu’une
robe bleue, aussi belle qu’elle soit, portée par la plus élégante des femmes, ne
doit jamais, non jamais, prendre le dessus sur ce qui compte le plus: notre Liberté.
Tableau "la Dame en bleu" de Jean-Baptiste Camille Corot, 1874 (Musée du Louvre, Paris)
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